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dimanche 8 septembre 2013

201308 Kamchatka Part 4: expedition au Kluychevskoy


Le volcan Kluychevskoy, non content d'être le plus haut point d'Eurasie avec ces 4850m, est en constante éruption depuis 2005. J'ai appris 2 jours avant le départ qu'il y avait eu une énorme explosion 4 jours avant avec un gros bloc de roches volcaniques qui a ete éjecté dans les airs et est retombé face sud du volcan. Et dire que Vladimir était en train de le monter avec 3 autres touristes mais heureusement du coté nord! On a regardé avec Ana sur le site http://www.volcanodiscovery.com/kamchatka/klyuchevsky.html l'état du volcan et il était en Rouge "éruption"...pas très rassurant mais bizarrement en recheckant le site en début de soirée, il était repassé en alerte Jaune puis en fin de soirée en alerte Verte. Je vous mets ci dessous le détail du bulletin météo a 2 jours de partir...a moitié rassurant!
Saturday, Aug 17, 2013
MODIS hot spot at the summit of Klyuchevskoy volcano (MODIS, Uni. Hawai'i)
MODIS hot spot at the summit of Klyuchevskoy volcano (MODIS, Uni. Hawai'i)
A new eruption began at 06:30 UTC on 15 August, KVERT reports. Accompanied by strong tremor, strombolian activity has been taking place in the summit crater.
Incandescence at the summit of the volcano's summit were observed at night and a gas-steam plume containing small amounts of ash rose up to 18,000 ft (5.5 km) a.s.l. and drifted to the north-east of the volcano on August 16. Satellite data showed a big and bright thermal anomaly over the volcano on August 15-17. 



On s'est retrouvé a 8:30am avec Vladimir a la station de bus et nous voilà parti pour la 1ere journée de transfert a destination de Klyuchi. Notre bus était archi plein et il y en avait un 2eme qui suivait. Ce dernier a crevé un pneu et j'ai pu assister en direct a un changement de chambre a air méthode ruskof!

On est arrivé vers 18h a Klyuchi et Yelena m'avait prévenu de longer les murs dans ce village car il y a une base militaire juste a coté et les touristes sont censés demander des autorisations pour pouvoir venir mais ça prend au moins 15 jours donc on n'avait fait sans. Vladimir était comme un poisson dans l'eau ici, il avait tous ses repères et connaissait beaucoup de monde. On a fait le check in dans une guesthouse. Il m'avait annoncé le prix a l'avance soit 1000rub (25€) par personne et je devais bien sur payer pour lui et moi en sachant qu'on partageait la même chambre: pas donné tout de même! Vladimir est parti négocier une jeep pour le lendemain matin et on s'est une nouvelle fois pris la tête sur le planning. Je voulais démarrer tôt genre 6am en jeep pour ensuite avoir le temps de marcher jusqu'au base camp de 2200m et de tenter l'ascension le lendemain mais lui voulait dormir au base camp situé a 1200m, soit a 2h de marche du tout premier base camp situé a 980m. On s'etait mis d'accord sur un trajet en jeep jusqu'au base camp de 1200m pour 10,000rub (250€) l'aller et 3h de trajet mais finalement Vladimir a du négocier au rabais et gratter sur les 10,000 que je lui avais précédemment donné. En voyant en plus la jeep arrivée le matin pour un depart tardif a 10am, j'etais furax. Une espèce de boite de conserve tout en ferraille qu'on devait en plus partager avec une équipe de télévision venant tourner un reportage pour la tv moscovite. Ils n'ont fait que la moitié du trajet et nous, nous avons continué dans une seconde jeep, un peu dans le même calibre mais cette fois-ci, le chauffeur a commencé a sortir un fusil et des cartouches de 12. J'imagine que c'était pour les ours ou les caribous...
On est arrivé au base camp de 980m et on a rencontré un groupe de jeunes moscovites qui campait là avec 2 de leurs professeurs. J'ai discuté avec eux et ils étaient venus ici juste pour 2 jours a cette altitude pour admirer le volcan en éruption de nuit. Ils étaient étonnés quand je leurs ai dit que je n'étais pas un geologiste mais un simple touriste...
On a démarré le périple avec a peu près 20kg chacun sur le dos. Le sac de Vladimir faisait presque sa taille...Le rythme de marche était plutôt lent et Vladimir demandait a faire des pauses toutes les 30'. On a rejoint le base camp de 1200m en 1h50 et on a déjeuné a l'intérieur au chaud. Il était 14:30 et Vladimir m'a proposé de continuer pour le base camp de 2200m. J'ai sauté sur l'occasion et on a tout de même mis 4h de marche pour le rejoindre mais au moins, ça nous évitait d'utiliser la tente et surtout ça nous permettait de monter au sommet des le lendemain.

Vladimir parle un anglais plus que sommaire avec 4 mots "very good" ou "very poor" et "little problem" ou "big problem". Ils les placent dans ses phrases en même temps qu'il parle russe et on arrive a peu près a se comprendre.
La nuit, on pouvait voir toutes les projections incandescentes que crachait le volcan et on avait en plus la lune juste au dessus ce qui donnait un joli contraste. Les projections avaient l'air beaucoup plus puissantes qu'au Tolbachik et ça s'annonçait sportif le lendemain.
Je n'ai pas passé une très bonne nuit au base camp. Il faut dire que j'ai été accueilli par un cadavre de souris et Vladimir qui me répondit quand je lui ai montré: "little problem. Very good"! Je me suis réveillé quasi toutes les heures alors qu'on devait se lever a 4am. Le temps de préparer le petit dej et les sacs (plus petits cette fois car on avait prévu de faire l'ascension et de revenir dormir ici) et on a décollé a 5:30am. Le rythme de marche était encore très lent mais cette fois-ci, il n'y avait plus l'excuse des sacs lourds. J'ai mis a peu près 1h a comprendre en m'apercevant que Vladimir ne pouvait pousser sur ses genoux pour monter. Ca ne s'était pas vu la veille car la pente était douce mais là et malgré ses 2 bâtons de marche, c'était flagrant. Au bout de 3h de marche, on a eu quelques rochers qui fusaient  en provenance du sommet. Impressionnant: on avait l'impression de véritables balles de fusil qui sifflaient et qui allaient a tout allure. Pas bon de s'en prendre un en pleine face surtout qu'ils étaient de taille variable, le plus gros que j'ai vu faisant bien un bon 300kg! Vladimir a commencé a s'inquiéter du nombre de ces "rolling stones" comme il les appelle et m'a dit qu'il valait peut être mieux renoncer a l'ascension. Payer 2000€ pour m'arrêter là: pas question! Je lui ai dit qu'on continuait et on est monté pendant 2h supplémentaires jusqu'a 4300m en sachant que le volcan culmine a 4850m. Je n'arrêtais pas de le doubler et de l'attendre pour qu'il indique le chemin et je trouvais ça assez dangereux de marcher aussi lentement alors que les rolling stones se faisaient un peu plus nombreuses a chaque fois. Je lui ai proposé d'aller seul au vieux cratère, censé être a 4750m et de l'attendre là pour finir l'ascension jusqu'au nouveau cratère. Il m'a dit ok en me précisant de bien rester dans le couloir dans lequel on était qui était bordé par 2 glaciers et de surtout ne pas emprunter ces glaciers. il m'a également dit "I'm sorry" en comprenant bien qu'il était vraiment trop lent. Le temps était assez changeant avec parfois des nuages mais qui ne restaient pas et la plupart du temps, on pouvait voir le sommet et le ciel bleu. Je m'attendais a une ascension d'1,5h jusqu'au vieux cratère où j'espérais profiter d'une vue plongeante sur de la lave en fusion un peu comme au Tolbachik en encore plus impressionnant mais j'ai petit a petit déchanté. J'ai marché pendant 3h et il y avait de plus en plus de rolling stones. C'etait même parfois des pluies de rochers qui s'abattaient d'un coup, au début ils venaient du sommet et dévalaient la pente a pleine vitesse mais quand je me suis retrouvé plus près du cratère, ils arrivaient carrément du ciel. On avait l'impression d'un champ de bataille. J'avais trouvé une technique pour les éviter: me planquer juste derrière un gros rocher et je n'avais quasi que le casque qui dépassait et en plus protégé par le rocher, la probabilité d'être touchée était tout de même faible. Le problème est qu'il fallait également que j'avance et parfois la distance entre 2 rochers étaient de près de 20m et a cette altitude, courir lors d'une ascension vous coupe le souffle pour 5 bonnes minutes a chaque fois. Des mini tempêtes de vent ont commencé a sévir près du sommet et a redescendre là ou j'etais. Certaines étaient chargés de cendres volcaniques  qui arrivaient a passer a travers mes lunettes! J'ai entrepris de changer de manteau et de mettre le spécial "tempête" que Vladimir m'avait prêté pour l'occasion mais le vent était tellement fort que j'ai perdu pendant l'opération une des mitaines qu'il m'avait également prêté! Je pouvais voir le sommet de plus en plus prêt et même en étant a bout de souffle et attaqué par des pluies de rochers de toute part, j'ai forcé pour au moins jeter un oeil au cratère. En tout et pour tout, après être parti en solo, j'ai mis 3h20 avant d'atteindre quasi le sommet. Il me restait a peine 50m mais ces derniers étaient difficiles car il y avait de la cendre partout et très profonde, un peu comme de la poudreuse ce qui rendait l'ascension encore plus dure et les rochers de lave en fusion n'arretaient pas de tomber. J'en ai vu un tombé du ciel et faire un impact d'un bon 40cm de profondeur a a peine 3m de moi. Je me suis dit que j'y en prenais un comme ça, il n'allait pas faire que rebondir sur mon corps mais y laisser des traces. Je me suis alors souvenu de la phrase de Françoise et Claude, mes amis tour du mondiste qu'on avait rencontrés en Antarctique et férus de montagne qui m'avait dit que le plus dur lors d'une ascension n'était pas de monter au sommet mais de savoir s'arrêter et renoncer si les conditions étaient trop difficiles. Leur phrase prenait tout son sens ici et j'etais a quelques mètres de mon but, que j'avais monté pendant 8h30 pour arriver a ce point sans parler des 7h d'approche de la veille et du transfert en bus et jeep...trop dur de renoncer. Mais je ne voulais pas perdre la vie non plus et je me suis dit qu'au prochain rocher qui tombait près de moi, je renonçais et rebroussais chemin. Ca n'a pas tardé: il y a eu une nouvelle pluie de rochers dont 2 gros qui sont tombés très près avec le plus proche a 30cm de ma jambe. Il y avait du brouillard de folie et un vent pas possible. Il y avait en plus dd fortes chances de ne rien y voir au sommet et je ne me voyais pas attendre qu'un éclairci se profile a l'horizon dans de telles conditions. J'ai fait demi tour et ai débuté la descente qui n'était pas moins périlleuse: les rochers sifflaient de toute part et j'etais de dos cette fois-ci. J'essayais de me retourner des que j'entendais du bruit et ça n'a pas loupé: un rocher de près de 20cm de diamètre est venu foncer sur ma poitrine a toute vitesse, j'ai pu l'éviter en me penchant de coté et il est passé a quelques centimètres de moi! Je ne voyais pas grand chose lors de la descente avec les nuages qui m'entouraient. Impossible de trouver Vladimir. J'ai entrepris la descente sans trop trainer car ça sifflait toujours beaucoup malgré le fait que je me sois écarté du sommet. Je me suis retrouvé sur un glacier et bien sur impossible de retrouver le couloir par lequel on était monté. C'était très glissant et dangereux et je ne voulais pas me retrouver a glisser sans contrôler ma vitesse comme cela m'était arrivé en Albanie. Au bout de 2h et demi de descente, je n'arrivais toujours pas a trouver le moindre repère et a chaque fois qu'il y avait un faible éclairci sur la vallée, ce dernier ne durait que quelques minutes et je n'arrivais pas a m'y repérer. Je me suis dit que je ne devais pas être sur le bon flan mais je ne voulais pas descendre plus bas car je risquais de perdre de la hauteur pour pouvoir trouver un point de repère. Je suis descendu en biais sur la droite mais toujours pas trace de points connus. J'ai envoyé un sms a Vladimir pour lui dire que j'etais totalement perdu. Il était 16h passé et je commençais a baliser grave, parce qu'une nuit a la belle étoile ici sans duvet ni tente, je ne savais pas si je n'allais pas mourir congelé, d'autant plus que je savais que dans la vallée, il n'y avait rien si ce n'est les 2 bases camp. Aucun touriste ni âmes qui vivent ici et le 1er village était Kluytchi a 32km!
En regardant l'orientation du soleil qui illuminait encore une partie de la vallée (c'est Elsa qui m'avait parlé de s'orienter selon le soleil lorsqu'elle ne trouvait plus son chemin dans la montagne!), je me suis souvenu de comment il était placé la veille quand j'avais essayé de faire des photos du Kluychevskaya et en ai alors déduit que c'était peut être plus sur le flan gauche. J'ai marché en biais pendant près de 10' et j'ai aperçu un autre volcan qui me disait quelque chose puis quelques minutes plus tard, j'ai pu distinguer le refuge au loin que j'ai rejoint en 1h et demi: ouf, j'etais sauvé.
Je suis arrivé a 17:30 au refuge et pas de Vladimir a l'horizon. J'ai essayé de le joindre sans succès et lui ai envoyé un sms lui disant que j'etais au refuge avant de m'endormir après ces 12h30 de marches épuisantes. Je me suis réveillé 2h après dans un état un peu comateux et j'avais un terrible mal de crâne ainsi qu'une douleur intense a l'une de mes dents du fond. J'avais la tête qui chauffait et j'ai eu des hallucinations, comme si je rêvais éveillé. Je faisais la connaissance d'un jeune qui passait par là au refuge et qui venait lui aussi de Kazantip! Vraiment bizarre après coup. Vers 19h30, je me suis aperçu que mon sms n'était pas passé mais je n'avais pas de réseau au refuge. Je me suis dit que Vladimir allait de toute façon finir par arriver au refuge et suis resté comme ça avec ma douleur au crâne jusqu'a 21h où il faisait nuit noire et toujours pas de Vladimir. Ca devenait assez inquiétant. Il lui était peut être arrivé quelque chose. Je suis sorti dehors et ai enfin eu du réseau. Je l'ai appelé et il a tout de suite décroché et m'a dit qu'il arrivait dans 10'. Il est arrivé 1h et demi plus tard et m'a dit qu'il avait fait traduire mes premiers sms par des amis au téléphone et qu'il était resté a 4100m a me chercher toute la fin d'après-midi et la soirée. Il était a moitié gelé! Je lui expliqué comment c'était passé mon ascension et il m'a dit qu'il n'était pas monté aussi haut car c'était beaucoup trop dangereux et que je cherchais de l'adrénaline! Il m'a expliqué que le volcan avait explosé il y a 7 jours et que depuis le volcan était trop en éruption pour qu'on puisse l'approcher! J'etais vraiment fâché contre lui toute l'apres midi qu'il m'ait plus ou moins abandonné lors de la montée et que j'ai failli me perdre et ne pas retrouver le refuge sur la descente mais le fait qu'il m'ait attendu pendant des heures me prouvais qu'il avait tout de même une conscience professionnelle et que c'était peut être moi qui avais trop insisté. Je lui ai tout de même demandé s'il y avait moyen de retenter l'ascension le lendemain! Mais il m'a répondu que c'était désormais trop dangereux et qu'en fait, ils avaient fermé l'entrée du parc aux visiteurs depuis plusieurs jours. Je comprend mieux pourquoi il n'y avait pas âme qui vive ici hormis nous deux! A propos de mon mal de crâne et de mes hallucinations, il m'a dit que c'était du a l'acclimatation et au fait que je sois monté très vite de 2600m a 4800m puis redescendu aussi vite a 2600m. Je pensais que les symptômes ne se faisaient sentir qu'en altitude et pas après la descente...a creuser! 
On s'est couché vers minuit et Vladimir m'a dit avant de me coucher qu'il pleuvait...au réveil à 7am, c'était tout blanc. Il avait neigé près de 10cm pendant la nuit. Je n'imagine même pas si je n'étais pas parvenu a trouver le refuge la veille au soir!
Sur le coup, j'ai ete très déçu de mon trip au Kluychevskoy. L'endroit n'est pas incroyable car tout est recouvert par des coulées de lave durcies ou par des glaciers noirs dus a la cendre volcanique et le seul centre d'intérêt pour moi, le cratère, n'avait pas pu être atteint. Je me suis fait la réflexion d'un tel intérêt pour les montagnes d'altitude ou la nature n'y était quasi pas présente et où finalement seul le challenge d'aller très haut comptait et ai même commencé a remettre en cause ma future ascension du Mc Kinley que j'avais prévu de faire en Alaska. La nuit étant passée, j'etais tout de même content de mon expérience. J'ai pris des risques mais ça m'a donné une bonne leçon et permis de me connaitre un peu plus: moi et mes limites! Pour les quelques jours qu'il me reste, je vais essayer de me booker des trips plus natures afin de changer d'atmosphère et de découvrir l'autre coté que le  Kamchatka a à m'offrir!




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